Galerie de portraits, photo d’un monde à un instant critique, chambre d’enregistrement des soubresauts politiques, valse folle des destinées : les urgences sont ici un observatoire du réel, où le temps suspendu condense la rapidité du geste et l’attente sans limite. Les urgences c’est l’espace exceptionnel où on pronostique la vie, où on gère les flux, où on prend le pouls. Descendantes des hôtels-dieux, ces hospices qui accueillaient les marginaux, les urgences continuent d’assurer une fonction sociétale qu’aucune autre instance ne remplace.

Fruit d’une immersion dans le service des urgences de l’hôpital Avicenne à Bobigny – anciennement « hôpital franco-musulman » – construit en 1935 en plein essor de la mission civilisatrice coloniale française, dont il abrite encore les fantômes. Moins un documentaire qu’une hallucination du réel, L’Urgence est une écriture subjective située dans l’espace et le temps, un cri politique, un besoin immense de foi et d’humanité.